20 Mai A 59 ans révolus, un homme n’est plus en âge de procréer
Dans une décision du 17 avril 2019 (n°420468), le Conseil d’Etat affirme qu’un homme n’est plus en âge de procréer à 59 ans révolus.
Monsieur et Madame C. avaient souhaité recourir à une procédure d’assistance médicale à la procréation, en utilisant les gamètes congelés de Monsieur C., recueillis entre 2008 et 2010, alors qu’il était âgé de 61 et 63 ans.
A la suite d’une demande de transfert de ces gamètes vers un établissement de santé situé en Espagne, l’Agence de la biomédecine a indiqué que Monsieur C. « ne pouvait être regardé comme étant en âge de procréer au sens de l’article L.2141-2 du code de la santé publique » et a donc refusé ce transfert.
Rappelons que l’assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l’infertilité d’un couple, ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple une maladie d’une particulière gravité.
Le code de la santé publique pose plusieurs conditions au recours à la procréation médicalement assisté :
– Le caractère pathologique de l’infertilité doit avoir été médicalement diagnostiqué
– L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants et en âge de procréer.
– Ils doivent avoir consenti préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination.
Saisi de l’affaire en cassation, le Conseil d’Etat a rappelé que la condition relative à l’âge de procréer revêt une dimension à la fois biologique et sociale, qui est justifiée par des considérations tenant à l’intérêt de l’enfant, à l’efficacité des techniques mises en œuvre, et aux limites dans lesquelles la solidarité nationale doit prendre en charge le traitement médical de l’infertilité.
A l’appui d’un avis du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine, le Conseil d’Etat a précisé qu’il existait une corrélation entre, d’une part, l’âge du donneur lors du prélèvement du gamète, et d’autre part, le niveau des risques de développement embryonnaire, ainsi que des risques sur la grossesse et la santé du futur enfant ; le taux d’anomalies à la naissance et le risque de maladies génétiques augmentant avec l’âge du père.
Aussi, « compte tenu du large consensus existant dans la communauté scientifique et médicale », le Conseil d’Etat a estimé que c’était à bon droit que l’Agence de la biomédecine avait fixé à 59 ans révolus, en principe, l’âge de procréer au sens et pour l’application de l’article L.2141-2 du code de la santé publique.
Monsieur C. étant âgé de 61 et 63 ans à la date des prélèvements de ses gamètes, il n’était donc pas en âge de procréer.
Le Conseil d’Etat a précisé que la fixation d’un âge limite ne méconnaissait pas le droit au respect de la vie privée et familiale de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme.
Par ailleurs, elle ne constitue pas davantage une discrimination entre des hommes du même âge, au sens de l’article 14 de la convention, dès lors que ces derniers sont placés dans une situation différente selon qu’ils procréent naturellement ou qu’ils ont recours à une assistance médicale à la procréation.
Hélène LOR
CAYOL CAHEN TREMBLAY & Associés
Avocat